Le terme consentement est le mot à la mode en ce moment, mais au-delà du consentement, n’est-il pas temps d’apprendre aussi à respecter la volonté des femmes ? #menaretrash

Depuis quelques temps, je ressens une colère sourde et silencieuse mais bien présente et, le plus inquiétant, grandissante. Je ne sais pas exactement quand ça a commencé mais plus je suis confronté à ça, plus ma colère monte.
Ça, c’est l’irrespect que beaucoup d’hommes ressentent pour les femmes. Et je dirais même plus l’irrespect pour leur consentement. Parce que si on commence à valoriser le consentement des femmes et qu’on tire le fil, l’absence de consentement ne s’arrête pas au viol ou aux agressions sexuelles : ce que les hommes sont prêt à faire pour coucher avec une femme est aussi à questionner, l’absence de respect envers la volonté des femmes. Le fait qu’après une rencontre beaucoup d’hommes jouent aux amoureux transits afin d’attirer une femme dans leur lit pour disparaître ensuite, alors même qu’ils savent que la femme en question ne veut pas d’histoire sans lendemain, n’est-il pas déjà une atteinte au consentement de ces femmes ?
Heureusement, grâce à mon expérience et peut-être aussi à mon intelligence, je suis passée experte en débusquage de mythos. Je flaire vite l’entourloupe, les discours qui sentent la flûte traversière à plein nez. Et s’il m’arrive parfois de me laisser sciemment berner, jugeant le bougre bon candidat pour une nuit endiablée, la plupart du temps, je les dégage de ma vie, sans autre procès. Pourtant, même si je ne me fais plus avoir, à chaque tentative, la colère ne fait que monter d’un cran.
Moi qui ai toujours adoré le sexe, j’en arrive à ressentir de plus en plus de dégoût et à être de plus en plus sur la défensive dès qu’un homme s’intéresse à moi. Marre ! J’en ai marre d’avoir à me demander s’il me voit vraiment ou s’il n’en veut qu’à mon cul. J’aimerais tellement baisser ma garde, laisser les hommes venir vers moi et m’ouvrir à l’amour mais à chaque fois que je commence à le faire, sans surprise, le mec se montre décevant, affligeant et je ne sais pas ce qui est le plus insultant : qu’il n’en ait qu’à mon cul ou qu’il me croit assez bête pour tomber dans son piège. Je voudrais ne pas en arriver à détester les mecs, à les classer tous dans le même panier de bêtes dégueulasses mais à chaque expérience, mon cœur se gorge un peu plus de rancœur et il est temps que je rencontre celui qui arrêtera cette spirale.

Si vous êtes une femme, vous savez exactement ce dont je parle mais si vous êtes un homme, il va falloir que je vous mette dans la peau d’une femme pour mieux comprendre à quel point ces petits mensonges et réflexes de rien du tout pour certains peuvent devenir véritablement traumatisants pour d’autres. Fermez les yeux et imaginez que vous êtes une femme, que depuis votre plus tendre enfance, on vous a conseillé/appris de ne pas dire ou faire ce que vous voulez pour ne pas être prise pour un pute. Parce que, vous comprenez, avoir une vie sexuelle pour une femme, des désirs, est mal vu. Avoir chaud ou aimer le style mini-jupe/short et s’habiller court est mal vu. Se poser des questions sur la sexualité est mal vu. Avoir un corps est mal vu. Imaginez que chaque mot, chaque geste, chaque vêtement, le fait d’être trop ou pas assez maquillée sera méticuleusement observé et jugé pour qu’un jour ou l’autre on s’en serve contre vous.
Maintenant, imaginez que non seulement tout ça est mal vu mais que c’est aussi dangereux. Imaginez que lorsqu’on vous propose de sortir le soir vous deviez penser en permanence à comment rentrer saine et sauve chez vous, que n’importe quel homme que vous croisez puisse vous attaquer sexuellement, que dès que vous vous retrouvez seule dans une pièce avec un homme, la peur vous monte à la gorge. Alors vous me direz surement que tous les hommes ne sont pas des agresseurs et moi je vous répondrais qu’il y en a suffisamment pour qu’on ait peur de vous. Le sentiment de sécurité est un luxe que les femmes ne peuvent pas se permettre car il peut nous être fatal. Chaque jour, la rubrique Faits Divers regorge de ces cas où les femmes ont relâché leur vigilance ou alors où cette vigilance n’a pas suffi. Il ne s’agit plus de faire attention à ce que vous faites ou dites, mais de faire attention aux intentions de quelqu’un d’autre, à quelque chose qu’il est cause perdue de chercher à maîtriser.
Si les choses étaient inversées, vous ne voudriez plus nous côtoyer. Pourtant, bien habituées à tout ça, bien embrigadées dans la quête d’une belle romance et sottes que nous sommes, nous continuons à vous aimer, à rechercher votre attention, votre compagnie et, Ô horreur, votre tendresse. Evidemment, le syndrome de Stockholm a ses limites. On choisit nos interlocuteurs. On recherche un homme de confiance mais cela semble ne pas suffire. Parce que quand on a échappé aux insultes concernant notre vertu, aux coups ou aux agressions sexuelles et qu’on laisse juste un homme nous approcher, il faut faire attention à une autre atteinte à notre consentement : la manipulation, le mensonge, le fait de nous convaincre d’avoir des rapports sexuels sous des prétextes fallacieux. Et il y en a un qui est très vite trouvé : l’idée que c’est une belle histoire d’amour qui commence alors qu’il n’en est rien.
Et puis, il y a aussi ces hommes qui refusent de porter un préservatif pendant un rapport sexuel, prétendent qu’ils se sentent trop à l’étroit (sachant qu’un préservatif peut contenir un pied, une cheville et remonter jusqu’au mollet) ou, pire, il y en a même qui pénètrent leur partenaire sans préservatif, avant que la demoiselle n’ait le temps d’en demander un. Mais le top du top ce sont quand même ces hommes qui retirent la capote à l’insu de leur partenaire et continuent leur affaire. Messieurs, sachez que cette attitude peut vous mener tout droit en prison que ce soit sur le chef d’accusation de mise en danger de vie d’autrui ou celui du viol pur et simple.

On peut se dire que le viol est moins grave que le fait d’embobiner une fille ou de l’insulter mais j’en arrive à me poser sérieusement la question : où commence le viol du consentement ? Je sais bien que légalement c’est quand un individu est pénétré sans avoir exprimé son consentement mais moralement, socialement, psychologiquement, n’est-il pas aussi quand il n’y aurait pas eu de rapport sans violence, mensonge ou manipulation ? Pourquoi nous contentons-nous du besoin sexuel des hommes comme justification d’un acte qui n’est pas souhaité dans les conditions proposées ? Le plus important est-il la violence ou le non-respect du consentement ? La violence n’est-elle pas une circonstance aggravante du non-consentement ? Le fait qu’un mec en pleine possession de ses capacités convainc par la ruse une femme de coucher avec lui n’est-il pas aussi abject que celui qui, bourré, se soit mis à baiser sa copine toute aussi bourrée et qui dort à moitié ?
Je ne fais que de soulever la question mais le fait est que même si, grâce à mon expérience et ma perspicacité, je déjoue souvent les plans des mecs qui n’en ont rien à foutre de moi et essayent de me séduire, me promettant une belle histoire pour mieux me sauter, ça ne m’empêche pas de me sentir salie, utilisée, bafouée et en colère, exactement comme la victime un véritable viol. Bien sûr, je ne ressens pas tout le trauma, la culpabilité indue et la peur épidermique que ces femmes éprouvent mais une blessure similaire se forme à chaque coup de canif. Le sentiment d’être inintéressante, bonne qu’à ça, vide, peut mener à des comportements dangereux.
Et ce qui est le plus fou, c’est que je crois que si on compte dans les violences sexuelles, les coups d’un soir déguisés en amours naissants (violence psychologique) et les ports du préservatif refusés sans se soucier de l’avis de la personne pénétrée, il y a bien plus d’hommes qui ont déjà eu recours à ces pratiques que l’inverse. Même parmi les gentils garçons élevés par des femmes, beaucoup y ont déjà eu recours. Comment se fait-il que dans un pays aussi « évolué » que le nôtre, le fait de mépriser la volonté de plus de la moitié de la population soit aussi répandu et accepté par toute la société ? Car il ne s’agit pas de l’attitude de quelques salauds ici et là. Non, non, c’est systémique et chaque couche de la société est touchée par ce mépris du consentement féminin. Même certains mecs qui se disent féministes le font sans se rendre compte qu’en faisant croire à une femme qui s’intéressent vraiment à elle juste pour coucher avec elle, ils ne font qui lui dégueuler leur mépris au visage. Dans l’esprit de beaucoup trop d’hommes, utiliser une femme comme un objet sexuel est acquit. Comme si nous n’étions bonnes qu’à ça. Et à faire les tâches ménagères, bien sûr.

Tout cela commence dès l’enfance, avec l’éducation. On apprend aux petite fille à désirer, à dire « je voudrais » et aux petits garçons à dire « je veux ». L’un attend qu’on lui accorde, l’autre s’impose et se sert. Le 12 mars dernier, dans une chronique pour RTL, Julie Guayet nous parlait du Test du yaourt. L’idée est de prendre le prétexte d’un tournage de publicité de yaourt et de demander à des enfants de 7 ans de manger un yaourt qui a été salé au préalable en disant à la caméra « Mmmm c’est bon ». Sans surprise, la grande majorité des garçons s’exclame « berk c’est dégoutant » alors que les filles réussissent le test. Déjà à 7 ans les garçons ne pensent qu’à ce qu’ils pensent et ressentent spontanément, sans se soucier des autres, alors que les filles cherchent déjà à faire plaisir et font ce qu’on attend d’elles. Dès 7 ans le problème est déjà là, latent.
Les choses ne font qu’empirer par la suite avec ce que j’appelle la Sacralisation du désir masculin. Non seulement, dans notre société, le désir des hommes est roi, justifiant tous les débordements sur l’idée que les hommes ont des besoins sexuels qu’il leur faut à tout prix assouvir, mais en plus, la valeur d’une femme dépend souvent du fait qu’elle soit jugée baisable (attirante) ou pas. Et on apprend aux jeunes hommes que leurs désirs passent avant tout. Parce que c’est la nature, vous comprenez. Il passe avant la raison, avant la loi et avant le consentement. Les hommes sont des bêtes en rut qui ne contrôlent pas leurs pulsions. Néanmoins, n’avez-vous jamais remarqué que les pulsions sexuelles des pervers les plus dangereux n’arrivent jamais quand leur proie est accompagné de son grand frère de 2m, champion de MMA ?
D’autre part, dès leurs plus tendres années, on apprend au jeune fille à se méfier des garçons. Nous avons toutes eu droit au contrôle de la longueur de la jupe, à se démaquiller avant d’aller à l’école ou au discours « méfis-toi des garçons ». D’ailleurs ce titre a même été celui d’une chanson d’Hélène Rollès, l’idoles des enfants en 1994. En revanche, ce qu’on apprend aux garçons c’est que pour arriver dans le lit des filles, tous les coups sont permis, que la nature est ainsi faite : les filles sont des proies et eux les chasseurs. Même le terme du Mâle Alpha tant à la mode en ce moment provient précisément de cette idée que le sexe est un dû qu’il n’ont qu’à saisir. D’ailleurs, une des techniques de drague les plus courantes consiste à rabaisser une femme pour qu’elle se sente honorée que le même mec qui la considérait à peine lui accorde enfin de l’intérêt. C’est de la manipulation pure et simple qui repose sur le besoin de validation inculqué aux femmes dès leur enfance.

Soyons clairs : le corps des femmes complètement objetisé par notre société. Je pourrais vous parler des pubs de yaourts vendus par une femme dans leur plus simple appareil (parce que nous mangeons tous nos yaourts à oilp, c’est bien connu) mais j’ai envie de pousser la réflexion plus loin. Et si nous regardions notre façon de considérer le sexe comme un bien de consommation comme un autre ? On n’échange plus, on consomme et le phénomène ne fait que s’aggraver avec l’explosion des applications de rencontre qui n’ont aucun intérêt à nous permettre de rencontrer vraiment l’amour et nous offre juste une plateforme pour choisir sur catalogue notre prochain partenaire sexuel. On couche comme on mange un morceau de fromage devant le frigo parce qu’on la dalle et qu’on a la flemme de se préparer un vrai plat. On ne prend plus le temps de se rencontrer vraiment, de se découvrir, sans réaliser que ces histoires de plans cul et de sexfriends ne sont que des substituts de relation qui ne font que nous isoler davantage car on ne sait plus prendre le temps d’apprécier et d’aimer l’autre. On veut tout, tout de suite.
J’irais même jusqu’à dire que cette ubérisation du cul n’est rien d’autre qu’un vestige de cette domination sexuelle : sexer sans réelle considération pour l’autre. Et le fait que les femmes s’y mettent aussi ne veut pas dire que le rapport de force s’inverse. C’est juste plus facile pour ces messieurs. Ne dit-on pas « un trou est un trou et la bite n’a pas d’œil » ? Je ne sais pas pour la bite, cela ne concerne que vous, messieurs, mais autour du trou, il y a un être humain qui ressent des émotions et qui, qu’il en soit conscient ou non, souffre de ce manque de considération. On reproche souvent aux femmes ne pas se respecter mais qui profite sciemment de ce manque de confiance en soi inculqué par notre société ? Les hommes qui décide de rassurer et d’entourer d’amour une femme qui ne « se respecte pas » pour qu’elle reprenne confiance en elle ne sont pas légion. Non, on profite bien d’elle et on la passe au suivant. Quel comportement abject ! Pourquoi acceptons-nous encore ça ?
Si on y réfléchi, le simple fait qu’il existe des prostituées qui vendent leur corps pour que des hommes puisse se « décharger » en elles et problématique. Et le pire, c’est qu’on ose le leur reprocher alors que ce sont les hommes qui exercent leur domination sexuelle en faisant appel à elles. Ce sont eux les bénéficiaires de cette situation et bien souvent, ce sont eux qui exploitent ces travailleuses du sexe. Je me suis souvent dis que je ne comprenais pas comment on pouvait coucher avec quelqu’un contre de l’argent en sachant pertinemment que l’autre ne nous désire pas vraiment. Je trouve l’idée de payer quelqu’un pour coucher tellement insultante. Mon égo ne le supporterait pas. J’ai fini par comprendre pourquoi je ne saisissais pas alors que ça semblait évident pour tout le monde : je suis une femme. On m’a appris à séduire, à échanger, à valoriser l’autre, à ressentir au moins de la tendresse pour mon partenaire. Il m’est impossible d’imaginer coucher avec quelqu’un que je n’apprécie pas et que je méprise. Ce n’est pas un problème pour beaucoup trop d’hommes.

Vous vous dites surement que c’est bien beau tout ça mais que s’ils ne peuvent utiliser ni la violence, ni la ruse, comment feront les hommes pour avoir des rapports sexuels ? Ce à quoi je peux déjà répondre par l’idée que peut-être que se montrer juste suffisamment intéressant et agréable serait un bon début, mais je vous dirais surtout : à quel moment les femmes se doivent de laisser les hommes assouvir leurs besoins dans leurs chattes ? En quoi les besoins sexuels des hommes sont le problème des femmes ? Commençons par ça. Depuis quand permettre aux hommes de se branler à l’intérieur de nous est OK ? Parce que, que les choses soient clairs : à partir du moment où tu couches avec quelqu’un qui n’aurait pas couché avec toi si tu lui avais honnêtement demander son avis, on ne peut pas parler d’échange. Tu t’es juste servi.
Partout dans le monde, il y a des hommes et des femmes qui arrivent à mettre de côté leurs envies pour diverses raisons, les hommes PEUVENT ne pas avoir de partenaire sexuel pendant des mois, voire des années et respecter tout simplement la volonté de leur partenaire en lui demandant ce qu’elle veut. Beaucoup trop choisissent juste de ne pas le faire parce que notre société le leur pardonne beaucoup trop. Eh bien moi, j’ai décidé de ne plus pardonner et de ne plus accepter. Chercher à me mentir et/ou à me manipuler pour obtenir mes faveurs sexuelles, c’est s’exposer à mon mépris et mon absence pure et simple.
Et avant que j’en arrive à détester ouvertement les hommes, si tu en es un, par pitié, à partir de maintenant, à chaque fois que tu couches avec une femme, demande-toi si elle a bien toutes les informations pour prendre la décision éclairée de passer la nuit avec toi. Si la réponse est non, sache que tu es en train de violer son consentement et que ton désir pour elle ne justifie absolument pas que tu malmènes ses émotions. Et si vous êtes parents, de grâce, arrêtons ce massacre et apprenons à nos garçons et respecter le désir des femmes et à nos filles à mépriser purement et simplement ceux qui ne s’interessent pas à elles pour de bonnes raisons. Il est légitime de vouloir être aimée, beaucoup moins d’exploiter cette faille pour obtenir du sexe. C’est aussi simple que ça.
Juste Waouh, et félicitations pour cet article magnifiquement écrit et efficace !!!
Oh, merci beaucoup. Ca me touche énormément. J’ai vraiment ouvert mon cœur sur cet article.